Présentation

Paroles de lecteurs

Images Aléatoires

  • Trio
  • Wishes
  • Little-India.jpg
  • Image-7.png
  • Femme-multicolore.png
  • By-night.jpg

En lisant en écrivant

De la relativité de l'amour

 

/David a laissé/ un Post It où il y avait mes numéros de téléphone et une citation :

La littérature nous prouve tous les jours que la vie ne suffit pas.

Ou le contraire ?

J'ai bu un mauvais Nescafé dans son jardin de curé, les coudes sur une table en plastique blanc de camping ; c'est difficile de boire quand on ne peut cesser de soupirer.

Au sortir d'une nuit d'amour comme celle-là - et, malgré mon passé fastueux, des nuits comme celle qui venait de s'écouler je n'en avais pas tellement eu -, on a la sensation de ne plus être maître de soi, de ses lèvres, de ses mains, jusqu'à la respiration qui semble ne plus vous appartenir.

On s'est tellement mêlés, on a si prodigieusement été l'un l'outil du plaisir de l'autre, que reprendre son corps en main semble insensé.

 

Les premiers mots qui suivirent la nuit où on est non seulement tombés amoureux, mais littéralement tombés l'un dans l'autre, ont une singulière saveur de vérité. Plus qu'on ne le voudrait, on se découvre, à l'autre comme à soi.

Ils restent, ces mots-là, comme un écho qui rend tout le reste indécent.

/David/ me dit qu'il m'avait attendue ; il savait que je lui reviendrais, car j'étais faite pour lui de toute éternité ; moi seule pouvait le guérir de sa fracture profonde, de son mal de vivre ; il me dit que j'étais la femme qu'il avait le plus baisée dans sa vie, tout seul ou aux côtés d'autres.

Il me dit que son âme était à moi et qu'elle m'appartenait depuis toujours.


J'étais comme un enfant pauvre qui hérite de la fortune de Rockfeller.

En même temps, je ne pouvais pas, je ne voulais pas le croire. Ç'aurait voulu dire que je trahissais ce que j'étais, ce en quoi je croyais : que rien n'est éternel, qu'on est profondément et définitivement seuls ; et cela, au fond, me convenait parfaitement.

D'ailleurs, tout ce que j'avais vécu me le confirmait.

Mes meilleurs moments sont ceux que je passe en tête-à-tête avec moi-même, à me balader sur la berge d'un fleuve, à écouter le vent dans les feuilles des peupliers. Ou un livre à la main, étendue dans l'herbe. À écouter La Passion seon Saint Matthieu, à parler à un chat, à dormir dans un grand lit vide et un peu froid...

La présence d'un homme a toujours masqué, d'une certaine manière, mon bonheur. Je n'ai d'yeux que pour lui, alors que le reste du monde m'a toujours semblé plus intéressant que l'amour.

Il y a une vieille dame qui habite au fond de moi, une vieille dame agacée par tous ces frottements, toutes ces scènes, par les baisers et les larmes. Elle a les yeux clairs, la peau propre et sèche, et n'aspire qu'au calme pensif d'un matin d'hiver ; le reste, ça la laisse sceptique et un peu navrée.


Simonetta Greggio, Plus chaud que braise extrait du recueil de nouvelles L'Odeur du figuier.


 -----------------------------------------------    

Être d'eau

 

Je bénis l'inventeur des fiançailles. La vie est jalonnée d'épreuves solides comme la pierre ; une mécanique des fluides permet d'y circuler quand même.

Il y a des créatures incapables de comportements granitiques et qui, pour avancer, ne peuvent que se faufiler, s'infiltrer, contourner. Quand on leur demande si oui ou non elles veulent épouser untel, elles suggèrent des fiançailles, noces liquides. Les patriarches pierreux voient en elles des traîtresses ou des menteuses, alors qu'elles sont sincères à la manière de l'eau.

Si je suis eau, quel sens cela a-t-il de dire "oui, je vais t'épouser" ?

Là serait le mensonge. On ne retient pas l'eau. Oui, je t'irriguerai, je te prodiguerai ma tendresse, je te rafraîchirai, j'apaiserai ta soif, mais sais-je ce que sera le cours de mon fleuve ? Tu ne te baigneras jamais deux fois dans la même fiancée.

 

Ces êtres fluides s'attirent le mépris des foules, quand leurs attitudes ondoyantes ont permis d'éviter tant de conflits. Les grands blocs de pierre vertueux, sur lesquels personne ne tarit d'éloges, sont à l'origine de toutes les guerres.

Certes, avec Rinri, il n'était pas question de politique internationale, mais il m'a fallu affronter un choix entre deux risques énormes.

L'un s'appelait "oui", qui a pour synonyme éternité, solidité, stabilité et d'autres mots qui gèlent l'eau d'effroi.

L'autre s'appelait "non", qui se traduit par la déchirure, le désespoir, et moi qui croyais que tu m'aimais, disparais de ma vue, tu semblais pourtant si heureuse quand, et autres paroles qui font bouillir l'eau d'indignation, car elles sont injustes et barbares.

 

Quel soulagement d'avoir trouvé la solution des fiançailles ! C'était une réponse liquide en ceci qu'elle ne résolvait rien et remettait le problème à plus tard.

Mais gagner du temps est la grande affaire de la vie.

 

Amélie Nothomb, Ni d'Ève ni d'Adam.


 -----------------------------------------------    

Bonheur

Un seul bonheur, tout d'une pièce, terrestre et céleste à la fois, temporel et éternel d'un tenant : le bonheur d'être au monde, en ce monde-ci, de l'habiter pleinement et de l'aimer tout en le reconnaissant inachevé, traversé d'obscures turbulences, troué de manque, d'attente, meurtri, raviné par d'incessantes coulées de larmes, de sueur et de sang, mais aussi irrigué par une inépuisable énergie, travaillé de l'intérieur par un souffle à la fraîcheur et à la clarté d'autore - caressé par un chant, un sourire.

Le bonheur imparti à Bernadette, comme à tous les hommes et femmes de sa trempe, consistait à avoir reçu un don de claire-voyance, de claire-audience qui lui permettait de percevoir l'invisible diffus dans le visible, la lumière respirant même au plus épais des ténèbres, un sourire radieux se profilant à l'horizon du vide, affleurant jusque dans les eaux glacées du néant.

Le don d'une autre sensibilité, d'une intelligence insolite, et d'une patience sans garde ni mesure.

Le don d'une humilité lumineuse - clef de verre, de vent ouvrant sur l'inconnu, sur l'insoupçonné, sur un émerveillement infini.

 
 

Sylvie Germain, La chanson des Mal-Aimants.

 

-----------------------------------------

Femmes, femmes, femmes...


Je me demande ce qu'aurait été ma vie plus tard si, enfant, je n'avais pas bénéficié de ces petites réceptions chez ma mère. C'est peut-être ce qui a fait que je n'ai jamais considéré les femmes comme mes ennemies, comme des territoires à conquérir, mais toujours comme des alliées et des amies - raison pour laquelle, je crois, elles m'ont toujours, elles aussi, montré de l'affection.

Je n'ai jamais rencontré ces furies dont on entend parler : elles ont sans doute trop à faire avec des hommes qui considèrent les femmes comme des forteresses qu'il leur faut prendre d'assaut, mettre à sac et laisser en ruines.

 

Toujours à propos de mes tendres penchants - pour les femmes en particulier -, force est de conclure que mon bonheur parfait lors des thés hebdomadaires de ma mère dénotait chez moi un goût précoce et très marqué pour le sexe opposé. Un goût qui, manifestement, n'est pas étranger à ma bonne fortune auprès des femmes par la suite.

Mes souvenirs, je l'espère, seront une lecture instructive, mais ce n'est pas pour autant que les femmes auront plus d'attirance que vous n'en avez pour elles. Si au fond de vous-mêmes, vous les haïssez, si vous ne rêvez que de les humilier, si vous vous plaisez à leur imposer votre loi, vous aurez toute chance de recevoir la monnaie de votre pièce.

Elles ne vous désireront et ne vous aimeront que dans l'exacte mesure où vous les désirez et aimez vous-mêmes - et louée soit leur générosité.

 

Stephan Vizinczey, Eloge des femmes mûres.

Tic tac

Avril 2024
L M M J V S D
1 2 3 4 5 6 7
8 9 10 11 12 13 14
15 16 17 18 19 20 21
22 23 24 25 26 27 28
29 30          
<< < > >>

Recherche

Profil

  • Chut !
  • Le blog de Chut !
  • Femme
  • 02/03/1903
  • plongeuse nomade
  • Expatriée en Asie, transhumante, blonde et sous-marine.

Flux et reflux

Syndication

  • Flux RSS des articles

Créer un Blog

Lundi 24 juin 1 24 /06 /Juin 10:20

Seoul, juin 2013.

 

Drive meJe claque la portière du taxi. Une gifle d'air froid soufflette ma sueur.

Le chauffeur se tourne vers moi, indécis.

Il ne semble pas ravi d'avoir chargé une étrangère. Il attend une direction, un nom.

Je fouille mon sac. Zut, le plan muni des précieuses explications en coréen est resté sur mon lit.

Mon hôtel se trouve dans un lacis de ruelles. Malgré mon piètre sens de l'orientation, je me pense capable de le localiser à partir du métro voisin.

- Jongno 3, dis-je d'un ton faussement assuré. Then I will guide you to my hotel.

Le chauffeur lève un sourcil interrogateur.

Je répète :

Drive, I will guide you to my hotel.

Mouvement de sourcils. Bras écartés en signe d'impuissance. Nous voilà coincés sur le bord de l'avenue en panne sèche de communication.

Mon vis-à-vis finit par s'emparer de son téléphone. Aurait-il la bonne idée de joindre un ami parlant un peu anglais ?

Non.

Le combiné se matérialise sous mon nez, assorti de la consigne "Repeat !". Ouf. Un logiciel de traduction instantanée va nous tirer de là.

Lentement j'articule :

I will guide you to my hotel.

Une voix électronique prononce en écho une phrase interminable. Le chauffeur me fixe interloqué, presque choqué. Ce contenu politiquement incorrect me restera à jamais un mystère.

Ce qui n'en est pas un, c'est que nous n'avons pas avancé d'un pouce.

Étape suivante : je dois taper sur le clavier du téléphone "I will guide you to my hotel." Ce que je fais, sans même me tromper d'une lettre.

La traduction ?

- Do you really think continuing this way is a good idea ? 

Bingo. Je n'aurais pas mieux dit !

 

 

Photo de Robert Doisneau.

Par Chut ! - Publié dans : Voyages, voyages - Communauté : les blogs persos
Ecrire un commentaire - Voir les 1 commentaires
Dimanche 23 juin 7 23 /06 /Juin 14:17

SeoulÀ Seoul, je n'ai pas appelé Min. La semaine s'est écoulée ainsi que je l'entendais, au fil des jours en mode roue libre.

La meilleure façon, à mon avis, d'explorer une ville.

Vers midi, douchée de frais, quitter l'hôtel sac en bandoulière. Dedans, un MP3 saturé de musique, un bon bouquin (Freedom de Jonathan Franzen), un stylo et un carnet, des cigarettes et un briquet, un plan de la ville.

M'arrêter dans un restaurant puis marcher, marcher des heures entières.

Prendre le métro à contresens, me perdre, tourner, demander mon chemin.

Sentir le pouls de la cité, ouvrir les yeux et les oreilles, me parler à moi-même et prendre des photos.

Ne pas juger, juste m'ouvrir, observer le différent, consigner l'inexplicable et m'amuser de l'inédit.

Me rendre disponible, garder l'esprit curieux, le sourire aux lèvres et le rire facile.

Accueillir sans questions ce qui se présente, savourer tous les moments, vivre chaque rencontre tel un cadeau.


Comme ce soir-là où, fatiguée, je répugnai à quitter l'hôtel. Malgré l'heure tardive, je n'avais pas encore dîné. Mon estomac vide m'entraîna vers les cuisines de rue installées autour du métro.

J'y rencontrai Jeffrey, un éditeur coréen et Samuel, un Canadien prof d'anglais.

Entre deux gorgées de soju*, le premier me poussa à travailler pour le National Geographic. Le second m'apprit qu'étant sa parfaite opposée - femme, blanche, blonde aux iris clairs -, je serais ici l'enseignante idéale. Et peu importe ma langue maternelle.

Le repas se conclut sur un rendez-vous : le lendemain, 18h30, pour manger du chien.

Le chien, j'y avais déjà goûté en Chine. Mais voilà des mois que Jeffrey poussait Samuel à tenter l'expérience. Des mois que Samuel disait oui tout en se dérobant. Par dégoût, sûrement, mais aussi par peur de trop aimer cette viande alors qu'il aimait beaucoup les chiens vivants.

Mon accord enthousiaste ne lui laissa plus le choix, et ses craintes se trouvèrent confirmées.

Oui, le ragout de chien, c'est vraiment bon.


Seoul 2bisComme ce samedi où, mon hôtel affichant complet, je dus en changer. J'entrai cinquante mètres plus loin dans une grande bâtisse.

À la réception, deux hommes.

Le premier, jeune, avait dû subir la classique opération de débridage des paupières. Ses yeux ronds, perpétuellement écarquillés, lui donnaient un air ahuri. Il semblait sortir à peine du lit, ne rien comprendre à rien et se demander ce qu'il fichait là.

Impression trompeuse, bien sûr.

Le second, d'âge mûr, avait la peau bronzée, des lunettes, des muscles épais, une carrure nerveuse. Sa force perçait derrière ses sourires.

Un ancien athlète, supposai-je.

Je me trompais du tout au tout.


Nous bavardâmes un long moment en anglais. D'où je venais, où je vivais, mes impressions sur Seoul... La discussion me faisait plaisir et je n'étais pas pressée.

Lorsque j'évoquai Paris, Eric, le jeune homme, me parla soudain en français. Ma mine ahurie le fit rire. Il avait séjourné en France, suivi des cours à l'Alliance Française.

- Mais quelle langue difficile ! grimaça-t-il.

J'acquiesçai.

Eric n'est pas qu'un simple réceptionniste. Ce travail lui permet de financer ses études de médecine pour, dans une poignée d'années, accéder à son rêve : s'installer à Paris.

Quant à son patron, il s'agit d'un ingénieur à la retraite recyclé dans l'hôtellerie. Cet hôtel, comme d'autres, lui appartient.

- Il a même conçu l'aéroport de Dubaï ! me souffla Eric.

Qui l'eût cru ? Je souris.

Le patron me proposa une chambre à prix cassé. Adjugé vendu.

Le lendemain, je copiai pour Eric tous mes musiques et toutes mes films français. Il n'aurait sans doute pas la possibilité de se les procurer. Puis j'aime à penser qu'à cet instant, un Coréen de Seoul écoute en boucle Gainsbourg ou Bashung.

Tout plaisir, s'il est partagé, n'en est que plus grand.

 


*Soju : spiritueux, souvent à base de riz, le plus consommé en Corée.

 

Photomontage : Dave McKean.

Par Chut ! - Publié dans : Voyages, voyages - Communauté : les blogs persos
Ecrire un commentaire - Voir les 2 commentaires
Dimanche 2 juin 7 02 /06 /Juin 18:38

Deconcertante douceur 1J'ai rencontré Pio un samedi. Il devait quitter mon île le lendemain.

Le dimanche il n'a pas pris le ferry.

Le lundi non plus. La journée fila à faire l'amour, la cuisine, du cheval et de la bronzette à la plage.

Il y a pire comme programme...

Le mardi Pio partit avec des regrets. Pas assez, néanmoins, pour accepter ma proposition : l'accompagner à Siquijor.

Son long voyage tirait à sa fin. Pio voulait faire le point, digérer son expérience de routard, se préparer à son retour en Allemagne. Son besoin de solitude pour se recentrer, je le comprenais si bien que je n'ai pas insisté.

Il est des moments de retrouvailles avec soi dont il ne faut pas faire l'économie.


Une semaine plus tard, nous avions rendez-vous à Singapour.

L'avion de Pio se posa par une après-midi de déluge. L'eau débordait de la rue piétonne où, bloquée en terrasse d'un restaurant de Chinatown, je buvais un mauvais café. Les yeux rivés à ma montre, je m'encourageais à braver les intempéries : peut-être Pio était-il déjà à l'hôtel.

Mon retard ne posait aucun problème en soi. La chambre était payée, le réceptionniste prévenu, Pio connaissait notre numéro de chambre. Il pouvait y déballer ses affaires en mon absence.

Mais ce serait moche, pensai-je. Un manque de délicatesse, la preuve d'une indifférence que je ne ressentais pas.

Ultime coup d'oeil à ma montre. Je me résolus à déplier mon parapluie pour quitter l'abri de l'auvent, retroussai ma robe jusqu'à mi-cuisses pour me frayer un chemin dans l'eau sale. L'hôtel n'était qu'à cent mètres mais j'y parvins trempée.

Pio se trouvait à la réception. Il venait tout juste d'arriver.

À Singapour nous fîmes ce que font tous les couples : l'amour encore, de longues balades bras dessus bras dessous, du shopping souvenir, des visites...

Dans un temple bouddhiste j'achetai un set de quatre pièces gravées. Je décidai que l'une reviendrait en donation au temple, que la deuxième serait pour Bertille, la troisième pour Pio, la dernière pour moi.

J'aime ce symbole du cadeau : le don spirituel et le don aux personnes chères.

 

Deconcertante douceur 2Pio s'ouvrit à moi comme rarement il se l'autorisait. Renfermé, réfléchi et volontiers taciturne, il n'avait guère le goût des confidences.

Son habituelle réserve rendit les siennes encore plus précieuses.

Juste avant mon départ il m'affirma :

- Je ne veux pas te perdre de vue.

Il m'écrirait, sans faute.

Me donnerait des nouvelles, évidemment.

Me reverrait, bien sûr, si un voyage le ramenait en Asie - ou si moi, par le plus grand des hasards, m'aventurais jusqu'en Allemagne.

Je ne doutai pas une seconde de sa sincérité. Tout en sachant, d'une tranquille certitude, qu'il n'en ferait rien.

Bingo.

Presque deux mois que Pio s'en est allé.

Deux mois sans un seul mail, même pas un pour me dire qu'il est bien rentré.

Je ne lui en tiens ni rancoeur ni rancune. Sa disparition n'enlève rien à ce que nous avons vécu. Son silence me blesse pas. Il ne m'est pas destiné, je crois : Pio, dans un autre monde, est passé à un autre chapitre.

 

Mais la tendresse, la donnée, la rendue, l'inattendue qui déborde, la quotidienne de nos journées, me déconcerte. Elle nous faisait ressembler à un vrai couple, un fort d'un passé, d'une histoire, d'un avenir, pas à un duo de vacances voué à vite se rompre.

Pire, s'ignorer.

Au réveil Pio prenait ma main, la cherchait dans la rue, déposait sur mon front une salve de baisers.

Dans les yeux des gens et en dépit de notre différence d'âge, lui et moi formions un couple. C'est d'ailleurs ainsi que je me sentais : en couple avec Pio. À Singapour et sur mon île, si radieuse qu'à plusieurs reprises on m'en fit compliment.

En couple même sachant que c'était faux, ou plutôt si éphémère.

Notre tendresse laissait supposer une complicité, une ébauche de sentiments, un ensuite peut-être.

Tout sauf ce silence en forme d'absence, de vide, de néant.

Et pourtant je ne suis pas déçue.

Et pourtant je comprends.


Deconcertante douceur 3Je sais que l'on peut être ému sans aimer, désirer sans s'engager, partager sans espérer.

C'est année après année ce que je fais, moi, avec mes amants.

Sincère lorsqu'ils sont là, oublieuse d'eux lorsqu'ils sont partis. Une page s'est tournée, j'attaque comme Pio le prochain chapitre, ce chapitre posé dès le prologue : mon lieu de vie n'est pour mes amants qu'une étape de leurs voyages.

Bientôt ils retraceront la route ou retourneront chez eux, en Europe ou en Amérique.

Une relation longue distance ? Non merci.

Possible que ma tendresse les déconcerte, d'ailleurs. Ou les effraie, car ils pourraient aisément m'imaginer amoureuse - de cet amour qui trop souvent marche avec la contrainte, les promesses à tenir, les comptes à rendre.

À moins que ma tendresse ne les enchante. Qu'ils ne s'y coulent sans réfléchir, jouissent des mots doux, des caresses, des attentions, de mes bras ouverts et de mes baisers.


Ma propre capacité à sortir de cette tendresse me surprend, d'ailleurs. Très vite un homme peut s'agréger à mon monde et y représenter beaucoup : amant, ami, confident, redresseur d'âme tordue, complice de fous rires. Nous dormons ensemble, nous éveillons côte à côte, partageons l'intimité d'un bref quotidien, nous blessons d'un mot et nous rabibochons d'un sourire.

Nous pouvons même plaisanter sur notre futur, la destination de notre lune de miel, la couleur des murs de notre chambre, les prénoms des enfants que nous n'aurons jamais.

Rapidement nous construisons notre bulle, créons nos codes, nos habitudes, forgeons nos anecdotes, la petite histoire de notre histoire.

Comme si celle-ci ne devait jamais se finir.

Comme si le temps ne nous était pas compté.

Mon plaisir n'est pas simulé. Mon bonheur n'est pas feint.

Rien n'est faux dans cette histoire mais remis en perspective, son essentiel n'est pas important. Si mon amant et moi nous donnons, nous nous reprenons avec la même facilité. Presque avec la même vitesse.

Même pas mal.

Reste une nostalgie diffuse, un vague regret de "c'était bien", un désagréable sentiment de solitude et d'excellents souvenirs qui aident à traverser la nuit.

 

Deconcertante douceur 4Mais pourquoi, moi si prompte à la tendresse, suis-je donc déconcertée par celle de Pio ou de Stefan ? 

Je crois pourtant à la vérité du moment. Une vérité instantanée qui jaillit, bondissante, susceptible de s'évanouir ou d'être contredite la minute suivante.

Une fugace mais néanmoins sincère.

Une légère mais néanmoins honnête.

Une qui permet de dire, les yeux dans les yeux, "je t'aime" sans que ces mots ne signifient autre chose. Sans en attendre de réponse ni de réciproque. Sans la lourdeur qu'on leur associe, sans la gravité des grandes déclarations.

Je crois aux vérités à l'image de la vie : mouvantes, imprévisibles, d'eau et non de granit.

Je crois aux vérités qui n'engagent que le moment de leur énoncé.

"Des vérités performatives", diraient les linguistes. Parce que je les ressens ainsi et souhaite les prononcer de même, mais les tais prudemment de crainte qu'elles ne soient pas comprises ou mal reçues.

Oui, je crois à ces vérités-là.

Mais quelle est, alors, la valeur des mots ?

 

 

Photos : Laurent Weyl, Umbo (Otto Umbehr), Shinichi Maruyama.

Dessin d'Alfred Gockel.

Par Chut ! - Publié dans : Bribes perso - Communauté : les blogs persos
Ecrire un commentaire - Voir les 3 commentaires
Samedi 1 juin 6 01 /06 /Juin 15:38

Notre nuit ici.

 

Trinidad 9bisMa peau se souvient de nos folies. Rapée le long de ma colonne, elle est rouge écorchée là où les noeuds l'ont frottée.

Mes muscles sont vrillés, ma gorge râpeuse, ma chatte endolorie, mes lèvres gonflées.

Entre elles Stefan s'enfonce doucement. Je l'accueille dans un souffle, jouissant de la douleur infligée par son membre et du plaisir de son corps lourd.

Ses doigts cherchent les miens, les étreignent à les briser.

- Longtemps j'aurai cette image... chuchote-t-il.

L'image de mon impuissance ligotée en équilibre sur le bord du matelas. De mes yeux qui l'implorent et le provoquent. De ses bras qui me repoussent dans une bascule tendue et prisonnière.

Gifle ou pichenette, si Stefan calcule mal son geste, je tombe à la renverse. Mais toujours il me rattrape avant que je ne sombre, avant même que je ne puisse m'inquiéter de sombrer.

Il a ma confiance. Il le sait. 

 

- Longtemps j'aurai cette image...

L'image de ses bras-balanciers qui m'attirent à lui. Mon buste qui chavire sur le drap, ma tête qui plonge entre ses cuisses, ma bouche qui se referme sur son centre palpitant. Mêlés à ma chevelure, ses poings m'impriment vitesse et mouvement. Emportée par leur force je ne suis qu'une poupée sans défense, une que Stefan enfonce d'un bloc jusqu'à sa garde pour mieux la rejeter.

Étranglée, libre, étranglée.

Des ruisseaux de bave roulent sur ma langue, mon menton, mon cou, mes seins.

- Longtemps j'aurai cette image...

Moi aussi, longtemps j'aurai l'image de ses yeux exigeants, de son impitoyable douceur, de ses cuisses constellées de marques bleuâtres.

Mon amant a l'épiderme trop fragile. Je l'ai trop mordu.

Après son départ je me recouche pour plonger dans l'hébétude.

Ce soir sans nous concerter nous avons rendez-vous. Et il en sera ainsi, chaque soir, jusqu'à ce que je quitte Bangkok.


Trinidad 10Au dîner Stefan m'avoue qu'en dépit de la fatigue, un sourire béat l'a accompagné toute la journée.

Entre lui et son travail, indécents et précis, des flashes venaient s'immiscer. Des visions de mes tétons violacés, de mes jambes écartelées, de son membre fiché au fond de ma gorge, des ravines creusées dans mon ventre par les liens.

La mine soudain gouailleuse, il avoue :

- Ce midi j'ai croisé notre voisine... Une Américaine.

- Ah. Et alors ?

- Alors ? Elle m'a dit bonjour !

Je hausse les sourcils.

- Depuis que j'habite ici, elle ne m'a pas salué une seule fois. Pas une seule ! Et son bonjour, il était bizarre... avec un drôle de rictus en coin, un peu gêné, un peu égrillard, et les yeux qui pétillent. Jamais elle ne m'a regardé comme ça. D'habitude, elle ne me regarde même pas.

- Mmmh.

Je soupèse les risques, évalue les possibilités.

D'un côté un plein milieu de nuit, la résidence éteinte et tous ses locataires a priori endormis.

De l'autre, mon studio éclairé et nos silhouettes qui passent et repassent, impudiques, devant la large baie vitrée.

Mieux qu'un théâtre d'ombres, un théâtre de chair rehaussé du rouge, vert, bleu des cordes et du piquant des baguettes chinoises.

Stefan insiste :

- C'était un bonjour inhabituel, crois-moi. Un bonjour qui sait pour la nuit dernière.

- Oh ! Et où loge-t-elle, cette femme ?

La réponse, je la connais déjà : dans le bâtiment d'en face.

En écho Stefan dit :

- Dans le bâtiment d'en face.

Des images censurées de cordes, noeuds, levrette, coups de rein, claques et supplices défilent sous mon crâne. Puis, par-dessus ce chaos de cul, de mouille et de foutre, une cocasse qui s'impose : le godemiché dont les vibrations meurent en moi et que Stefan, agacé, lance à travers la pièce.

- Putain de fabrication chinoise !

Un rouge rétrospectif me monte aux joues.

Puis l'intuition, fulgurante :

- Elle t'en reparlera.

- Euh... Tu crois ?

- Ma main à couper ! Et tu sais pourquoi ?

- ...

- Parce qu'elle rêve maintenant d'être à ma place !

 

Trinidad 11Nous rions aux éclats. Plaisantons des Américains, de leur pruderie et de leur façade de respectabilité. Des mots qu'il faut éviter de prononcer devant eux, des attitudes à ne pas afficher, de leurs Shocking ! dès que ça déborde.

Régle générale qui néglige les cas particuliers, bien sûr.

Nous tombons vite d'accord : parler de sexe, ça embarrasse les Américains.

Alors, de là en réclamer...

Fort de ses certitudes, Stefan me soutient bec et ongles que je me trompe :

- Vouloir être à ta place ? Impossible, cette femme est mariée !

Voilà bien une raison stupide !

J'ajoute que venue d'un mauvais garçon comme lui, l'explication ne manque pas de sel.

Le mariage, un rempart contre l'infidélité...

Mon amant shibariste est-il si naïf ?

Ou foncièrement idéaliste ?

Et depuis quand respecte-t-il les conventions ?

Je me moque :

- Toi qui baises les femmes ligotées, sûr que tu es un modèle de morale !

Stefan s'étrangle de rire, vaincu par KO comme mon corps l'est aujourd'hui.

Être attaché, il ne le suppportera pas.

Être fessé, contraint, pénétré, non plus.

Et notre témoin indiscret, alors ? Ce calme plat risque de l'ennuyer.

J'attrape Stefan par le col et le traîne jusqu'à la baie vitrée.

- Déshabille-toi !

- What ? Are you kidding ?

- Déshabille-toi, j'ai dit !

T-shirt, short et caleçon tombent mollement sur le plancher.

- Allez, du nerf !

J'agrippe mon amant, le ploie, lui claque la croupe. Une corde puis deux, et le voilà grossièrement ficelé, tout entier à ma merci à l'exception du bras droit.

Celui-là, il va servir.

- Maintenant tu dis bonjour à la voisine !

- No, no way !

- Comment ça, no way ? Allez, malpoli, dis bonjour !

Et Stefan, docile, d'agiter le bras en direction de l'immeuble d'en face.

 

Trinidad 12Le lendemain il me dira :

- J'ai recroisé notre voisine...

- Et ?

- Elle ne m'a pas parlé d'hier, juste de notre nuit. "Tu t'es bien amusé ?", m'a-t-elle glissé dans un autre sourire équivoque. Moi, j'ai fait celui qui ne comprenait pas. Amusé de quoi, Madame ?

Je glousse. La parade de Stefan est la bonne : rien de pire que d'avoir à s'expliquer sur ses allusions.

- Bon, on s'en doutait, c'est à présent confirmé : elle a tout vu... Et à sa mine, elle voulait me demander un truc...

Le picotement du rire me chatouille l'échine.

La mine innocente je demande :

- Un truc comme ?

- Comme, euh... D'accord, tu as gagné. C'est toi qui avais raison.

J'ai souri comme d'une petite victoire.

Petite car au fond si prévisible.

 

 

1re photo de Gilles Berquet ; dernière d'Eliane Escoffier.

Par Chut ! - Publié dans : Eux - Communauté : les blogs persos
Ecrire un commentaire - Voir les 2 commentaires
Vendredi 24 mai 5 24 /05 /Mai 17:35

L'épisode précédent ici.

 

Trinidad 6Le quartier routard de Kao San regorge d'hôtels bon marché, de bouis-bouis, de bars branchés et de vendeurs de tout : bijoux, vêtements, sacs, chaussures, souvenirs...

Sur Rambuttri Road se tient un magasin improbable, une épicerie-drugstore-papeterie-grossiste, îlot de résistance incongru entre deux 7-11. Difficile de le remarquer en passant. Mais une fois qu'on l'a remarqué, on ne voit plus que lui.

C'est là que j'emmène Stefan.

Cui cui cui !

Le chant de l'oiseau carillon donne le ton.

Bâtie en longueur, l'échoppe est aussi délabrée que ses tenanciers. Se relaient à la caisse lui, le Papy décharné en marcel et short crasseux, et elle, la Mamie obèse en chemise trouée.

Poussiéreux, les rayons croulent sous la marchandise bon marché entassée dans le plus joyeux désordre. Les brosses à dents voisinent les enveloppes, les enveloppes les bougies, les bougies les tournevis.

En fouillant, on exhume aussi des briquets, des tapis de sol, des élastiques, des ampoules, des panières... Impossible d'y dénicher son bonheur sans demander de l'aide aux propriétaires, qui parlent tout juste deux mots d'anglais. Souvent il faut mimer ce qu'on veut, sans garantie d'être compris.

Faire ses courses ici est une expérience en soi, et notre seule chance un dimanche à 20 heures.

Sinon, où pourrions nous acheter des cordes ?


Les cordes du magasin nous arrachent cependant une moue de dépit. Grossièrement teintes en rouge vif, vert pisseux, bleu chantier ou jaune canari, elles s'avèrent trop minces, et surtout en plastique.

D'un qui ne se plie guère.

D'un qui doit érafler la peau et la brûler en filant entre les noeuds.

- You have different ?

Anglais minimum pour choix minimaliste : des rubans en raphia ou des spaghettis en caoutchouc.

Va pour le plastique, alors.

Stefan vérifie le métrage et choisit les couleurs. Rouge, vert, bleu, deux de chaque, une vingtaine de mètres au total.

Il tente un noeud, une attache, un autre noeud. Je l'observe avec intérêt. Clair qu'il n'en est pas à son coup d'essai. Clair que ce savoir-faire m'enchante. Les adeptes du shibari ne sont pas si nombreux... Ma chance est d'en avoir rencontré un.

Par hasard, même.

 

Trinidad 7 Par hasard, vraiment ? Je m'interroge.

Aurais-je, à mon insu, un radar qui me pousse vers eux ?

Ou une aura sexuelle qui les attire à moi ?

Ou ceux qui se ressemblent finissent-ils toujours par s'assembler ?

- What else do we need ?

Mmmh. Je réfléchis.

Un godemiché ?

Oui, mais la boutique a ses limites.

Du lubrifiant ?

Pourquoi pas, mais pas ici non plus.

Des pinces à linge ?

Non. Trop douloureux sur les tétons.

Stefan s'empare d'un paquet de baguettes chinoises. Parfait, j'ai du fil chez moi.

How much, please ?

Papy encaisse la monnaie, Mamie enfourne nos emplettes dans un sac.

Nous pouffons en complices. Au grand jamais le couple ne se doutera de notre nuit.

 

Retour à Sukhumvit.

Au pied du métro Nana, le marché de nuit propose ses DVD pirates, ses cigarettes électroniques, ses pompes pour agrandir le pénis, ses pilules miracle contre l'impuissance et la frigidité.

Superflu dans notre cas. L'aube dernière nous l'a prouvé : le corps de Stefan et le mien s'emboîtent à la perfection. Ses paumes ont l'exacte taille de mes seins, sa langue celle de ma chatte, son sexe celle de mon fourreau.

Coulé en moi, mon amant est à ma délicieuse mesure. Démesure, aussi. XL comme ces préservatifs que nous cherchons dans tous les 7-11, écumant les présentoirs, retournant les boîtes et déchiffrant les étiquettes à l'affût des plus larges dimensions.

Vite une conclusion s'impose : XL n'est souvent qu'un argument de vente, une taille standard habillée d'une exagération et d'une flatterie. Nous voilà bien en Asie, continent où les vérités sont rarement bonnes à dire...

Notre sésame en poche, nous ressortons sur le boulevard.

Des godemichés alignés tels les Dalton sur un étal nous arrêtent. Du même brun que la verge de Stefan, le plus imposant m'attire. Mais une fois niché dans ma paume, la déception.

Mou, trop mou, ce jouet a l'érection en tour de Pise.

Le vendeur blasé retire les piles pour les introduire dans son voisin. Rose vif, sa tige dévoile les entrailles de sa batterie.

Bingo, celui-ci vibre droit sans le crin-crin d'une moulinette.

Une bouteille de vin, du chocolat, un baiser et nous voilà dans mon studio, bouclés à triple tour. 


Trinidad 8bisRouges zébrures cisaillant ma poitrine, pourpres éraflures dupliquant mon échine, balafres carmin entaillant ma croupe, les cordes sont serrées.

Leur grisante géométrie m'épouse, leurs noeuds pointus labourent mon dos, leur diamètre pénètre mes grandes lèvres alors que Stefan s'engouffre en moi.

À l'aplomb de son torse, les baguettes ceignent mes tétons. Supplice chinois brun violet, couleur étranglement, lancinante cisaille qui n'est rien, je le sais, comparée à ce qui viendra.

Lorsque Stefan tranchera les fils qui retiennent le bois.

Lorsqu'il le décollera de ma sueur.

Lorsque le sang affluera en force pour irriguer mes pointes. Pointes de chair parcourues de pointes de soufre aiguës comme des allumettes.

Mon ventre se révolte, ma gorge se rétracte. La verge de Stefan en jaillit dans un chapelet de bave.

Il me dit que je suis belle. Belle quand il baise ma bouche, plus belle encore quand il la viole. Je ne peux rien répondre. Il m'a déjà remplie.

Une gordée de vin roule de sa langue à mon palais. Je ne m'y attendais pas. Je tousse. Je m'étouffe.

Stefan s'excuse. Stefan rit.

Mes escarpins se collent à ses flancs.

Soudain mes jambes se déplient pour les déchirer. Mon amant gémit, lâche un mot comme un juron.

- Salope...

Je le défie du regard. Il me sourit, caresse ma gorge et me gifle.

Une gifle sèche qui rebondit sur ma joue.

Une gifle qui me fait hoqueter de surprise.

Je vais lui dire qu'il n'a pas le droit. Je vais lui dire et je me tais. Le seul mot que ma bouche peut former n'est pas non mais encore. Encore de sa force sur mon visage, entre mes jambes et dans mon cul.

Le long de mon échine les noeuds se resserrent encore.

Contre mon sang bat un autre pouls. Un qui m'écrase, me ploie et me fend.

C'est si bon d'être prisonnière.


Après l'amour, une cigarette sur le balcon. Stefan est nu, moi toujours en escarpins, cordes et baguettes.

Peu importe. À quatre heures du matin la résidence est déserte, l'immeuble d'en face éteint.

Personne ne nous regarde. Personne ne nous a vus.

Enfin... C'est ce que nous croyions.

 

 

Photos : 1re, Lew Rubens ; 2e, Frank Horvat.

Par Chut ! - Publié dans : Eux - Communauté : les blogs persos
Ecrire un commentaire - Voir les 3 commentaires
 
Créer un blog sexy sur Erog la plateforme des blogs sexe - Contact - C.G.U. - Signaler un abus - Articles les plus commentés